BD Classic

A peine arrivée à New York pour y retrouver son mari Ryan Murphy, Mary Ann est bloquée en quarantaine sur Ellis Island avec ses 3 enfants, l'un d'entre eux étant tombé malade pendant la traversée. Guidée par l'espoir de retrouver son mari, elle a quitté l'Irlande en utilisant l'argent qu'il lui avait envoyé pour acheter quatre billets aller-simple vers une nouvelle vie.

Ce qu'elle ignore encore au sujet des lettres dactylographiées de son mari et de l'argent qu'elles contenaient, c'est que c'est un autre qui les lui a écrites. Jack Jordan dit le "Giant" a préféré prendre soin de la famille de son camarade Ryan au lieu de leur annoncer sa mort. Ryan est décédé suite à un accident sur le chantier de construction du Rockfeller Center, où il était riveteur avec Giant, chargé d'assembler les poutres d'acier au marteau pneumatique, en équilibre à 500 pieds au-dessus du trottoir.

Inquiet de ne plus recevoir de lettres de Mary Ann, Giant décide de lui envoyer une dernière lettre en Irlande pour lui annoncer la mort de son mari et lui avouer son imposture. Mais le courrier lui sera retourné, la destinataire ayant quitté les lieux sans laisser d'adresse. C'est alors que Mary Ann débarque chez lui, pensant trouver son mari à cette adresse...

L'avis de Félix

Giant, c'est l'histoire attachante d'un personnage fort et généreux, plongé dans le milieu saisissant des "Sky Boys", ces courageux constructeurs des gratte-ciels de Manhattan qui risquaient leur vie en équilibre sur des poutrelles d'acier suspendues jusqu'à une hauteur de 70 étages.
Le scénario nous plonge dans l'ambiance maussade du New York des années 1930, pendant la grande récession qui suivit le krach de 1929, où les immigrés européens continuaient d'affluer par milliers à la poursuite du rêve américain, fuyant pour certains la famine causée par la guerre civile irlandaise. La construction du Rockfeller Center était le plus grand projet privé de l'époque, fournissant du travail à 4.000 ouvriers d'origines diverses.

Le récit est commenté en voix off par un journaliste qui passe à la radio, procédé narratif bien trouvé sachant l'importance, pour le Rockfeller Center, des studios radio qui s'y installèrent en nombre, ce qui lui valut rapidement le surnom de "Radio City".
L'auteur intègre aussi dans son récit une photographe de presse, en faisant référence au célèbre cliché des onze Sky Boys déjeunant sur une poutrelle qui semble suspendue dans le vide pendant la construction du Rockfeller Center.

Mikaël illustre son récit avec un superbe dessin jouant sur le contraste entre les paysages de New York vu d'en haut et ceux vus d'en bas, et avec quelques paysages d'Irlande. Les personnages typés ont des visages expressifs et la palette de couleurs sepia traduit parfaitement l'ambiance de l'époque et la morosité des personnages.

Une très bonne histoire, superbement racontée et illustrée par Mikaël.